" VOUS AVEZ RE-DIT FAMILLE ? "
Qu'est-ce que l'analyse systémique ? et qu'est-ce que la psychothérapie familiale ?Aucune prétention à vouloir définir ici l'une et l'autre, tant il y faudrait des ouvrages entiers qui existent par ailleurs ; seulement avancer quelques idées.
La thérapie de famille s'adresse à des enfants (quel que soit leur âge) qui ont la capacité, l'occasion, ou peut-être le don, d'emmener leur(s) parent(s) en thérapie. Si cette approche démarre le plus souvent sur le constat d'une difficulté concernant un seul des membres de la famille (l'enfant et son symptôme en constituent le paradigme mais pas l'exclusivité), elle se déroule, dans sa forme psychothérapique, de manière à ce que chacun et tous y découvrent des ressources nouvelles, libératrices vis-à-vis des dysfonctionnements qui ont créé les blocages relationnels et qui, par cette voie, ont favorisé l'émergence d'un comportement symptomatique devenu problème.
La difficulté d'un être humain, la traduction de cette difficulté en symptôme, disent ce qu'il en est d'une souffrance. En analyse systémique (analyse des systèmes de relations), le pari est pris que cette souffrance ne concerne pas un seul mais plusieurs, voire la totalité des membres de la famille : si l'on repense à l'exemple de l'enfant qui ne va pas bien, ses parents souffrent aussi la plupart du temps, de le voir dans cette situation et de se sentir impuissants à l'aider.
Le travail commun devient en ce sens une découverte, un enrichissement pour chacun des membres de la famille et pour la famille dans son ensemble. Une telle dynamique permet d'expérimenter d'autres positionnements, de se voir soi-même et de voir les autres d'une manière différente, y compris au travers des concordances qui ont pu entraîner l'apparition d'un trouble ou d'un problème (quand il y a dysfonctionnement, c'est toujours avec une bonne raison ; lorsque celle-ci s'éclaire, on peut laisser tomber celui-là et trouver, inventer d'autres sorties à nos souffrances en se défaisant de la culpabilisation ou du sacrifice). En somme, le champ du possible s'élargit, chacun y acquiert une place plus confortable en identifiant aussi celle d'autrui.
Il en va de même pour la thérapie de couple ou encore, avec quelques précisions dans le déroulement des processus, pour la psychothérapie d'adulte en individuel. L'analyse systémique - le praticien qui y est formé et l'utilise - reçoit le sujet dans toute sa singularité, toutefois en prenant en compte, d'une part le contexte des relations dont il fait partie, d'autre part la relation même avec le psychothérapeute en cela qu'elle devient le réceptacle des modèles jusqu'alors intégrés par ce sujet.
Cet échange, car il s'agit d'un "échange", permet de rejouer les modes relationnels d'habitude inconscients à partir des thèmes et des croyances qui les caractérisent ; il devient le lieu où se nouent puis se dénouent les règles et loyautés restées invisibles, et dont l'expression codée (tant en troubles personnels qu'en phénomènes relationnels) handicape la vie et le quotidien.
Cela n'est certainement pas une promesse pour le bonheur, mais le sens de la psychothérapie n'est pas de vendre quelque chose.
En considérant ces aspects, la famille, comme chaque sujet, vérifient que son authenticité et sa valeur intrinsèque ne sont ni opposées au reste du monde ou au groupe familial, ni soumises à l'un ou à l'autre.
Apparaît alors un couplage - individuation / appartenance - où chacun retrouve ce qu'il sait depuis toujours (re-dire d'où il vient, ce qu'il véhicule si fréquemment à son insu), en même temps qu'il s'assume tel un être plus libre, responsable de ses choix dans une relation donnée. C'est une occasion qui se décline comme une chance afin de reconstituer un espace propre à la personne, à soi, tout en s'ouvrant aux autres, notamment ces "autres" particuliers que sont nos proches.
Olivier TRIOULLIER
____________
Paru dans Cahier Spirale n° 2, bulletin de l'Association Spirale, premier semestre 2006.
(revenir au sommaire ou à la liste des articles)